79 - La bipolarisation politique

Publié le par Ya Santal

 DSC01149.jpg    La bipolarisation politique est devenue le standard des pays développés bien que la démocratie autorise la diversité des tendances.
   L’incompréhension du mécanisme à l’origine de la formation de deux partis majoritaires explique leur utilisation dévoyée.
   La présence de deux grandes formations politiques qui participent à l’alternance dans presque tous les pays démocratiques semble signifier une origine profonde au-delà des contingences. Leur courant politique s’oppose, l’une avec sa dominante sociale, l’autre économique. Cette constante répartition des préoccupations politiques quels que soient les pays pourrait s’expliquer par une origine naturelle.
   L’origine sociale influence l’orientation politique de l’électeur, mais elle ne l’explique pas entièrement. La répartition des classes sociales dans la population varie dans chaque pays et dans le temps, et cela n’affecte ni l’égalité tendancielle des deux forces ni leur orientation.
   L’orientation politique individuelle semble davantage tirer son origine ailleurs que du milieu familial, économique ou social.
   La finalité de la politique est de protéger les citoyens par la bonne gestion des biens et le respect des droits et des devoirs. La diversité des intérêts et des problèmes rend difficile une juste répartition de l’effort national pour les résoudre. La générosité des forces en présence intervient donc dans le choix de solutions momentanément avantageuses pour certaines catégories de la population. Ce trait de caractère semble déterminant dans la séparation en deux camps de courants politiques dont l’action renvoie à la structure de l’échange.
   L’échange est un double flux opposé : un flux donneur et un flux receveur. Ces deux courants contraires ont rarement la même fluidité naturelle dans les deux sens chez tous les individus. Chez les uns, le penchant altruiste est plus marqué que chez les autres davantage préoccupés par leurs propres intérêts.
   C’est ainsi que l’inégalité des deux flux dans l’échange individuel divise la population en deux parties tendanciellement stables. La répartition des deux courants politiques majoritaires semble ainsi obéir à une loi statistique, probablement représentable par une courbe de Gauss. La majorité des individus présente des flux faiblement différents, mais se divise néanmoins en deux camps tandis qu’une minorité souffre d’une grande distorsion de leurs flux. On retrouve ses derniers dans les partis extrémistes des deux camps.
   La nécessité de l’alternance provient de la complémentarité des deux courants politiques dont les qualités et les défauts s’opposent et se complètent.
   Une vertu excessive perd sa qualité et dégénère en défaut. Ainsi la générosité incontrôlée se dissout dans le gaspillage de l’utopie. En revanche, certaines qualités se construisent sur des défauts. Le réalisme est généralement une qualité de l’égoïsme.
   Dans ces conditions l’alternance permet de profiter des qualités de chacune des parties et de leur capacité à corriger les défauts de l’autre. Le réalisme ramène l’ordre au risque de créer des injustices et la générosité assure une meilleure répartition des richesses au risque de rompre les équilibres économiques.
   Dans la pratique, le parti au pouvoir fait parfois la politique de son adversaire. Dans ce cas, la trahison de l’électorat met en évidence la plus grande importance qu’accordent les professionnels de la politique à la conservation du pouvoir plutôt qu’au respect de leurs engagements.
  Il faut souligner qu’aujourd’hui, la mondialisation du libéralisme impose une concurrence impitoyable qui a réduit à sa portion congrue la marge de manœuvres des hommes politiques.
   Dans cette conjoncture, les partis sociaux sont les plus déprimés. Quand leur action obéit aux lois du libéralisme, ils trahissent leur idéal humaniste au profit d’une croissance économique en amplifiant les inégalités. Si au contraire ils luttent contre les injustices sociales, ils entrent en contradiction avec la cohérence des règles impitoyables du jeu international et précipitent le déclin économique par un affaiblissement des atouts concurrentiels.
   En France, l’humanisme persistant, bride la droite dans son désir de libéraliser le pays tandis que la gauche consciente de ses responsabilités en est réduite à limer laborieusement les rugosités du système faute de savoir le réformer. Désappointés par le manque de visibilité des résultats de l’action politique, nombre de citoyens se désintéressent de la vie politique et boudent les urnes en préférant l’expression de la rue. Ils contribuent ainsi au déclin de la démocratie.
   Si l’existence des paris majoritaires est l’expression d’une réalité sinon biologique au moins psychologique, leur efficacité dépendra de la cohérence de leur politique en accord avec les qualités qui sont à leur origine.
   L’enjeu politique majeur actuel est la réforme du libéralisme. Le positionnement clair des partis face à ce problème mondial exige que leur stratégie soit clairement exposée aux citoyens. Sans cette compréhension fondamentale, il sera difficile aux électeurs d’adhérer à un programme exigeant de leur part des efforts importants. Seule une stratégie bien exposée peut faire admettre des décisions ponctuels contraires dans le court terme aux valeurs du parti gouvernant mais qui dans la durée confirmeront l’orientation générale de sa politique.
   Le flou stratégique prépare le terrain de la manipulation du peuple. En l’absence de projets précis, s’inscrivant dans une stratégie bien définie, les leaders sans scrupule trompent les foules en avançant des arguments idéalistes éloignés de la réalité.
   Même si le citoyen n’a pas forcément la capacité d’appréhender tous les arcanes des programmes politiques, il doit au moins pouvoir se référer aux qualités et aux défauts des orientations politiques. Dans l’action politique, le réalisme et la générosité s’opposent autant que l’égoïsme et l’utopie. L’éducation de l’électeur passe par cette capacité à choisir opportunément et sans fanatisme la valeur sur laquelle on aura avantage à s’appuyer au cours d’une période limité.

Publié dans La politique

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